• Récit Antoine IV

    Pas de la Balme : on s’calme !                                                                          Retour

    Récit Antoine IVOn doit sortir des Balcons du Vercors par un chemin de chamois, qui serpente à la verticale au dessus de nous pour passer au dessus les barrières rocheuses, puis longer un sentier en terrasse qu’on dirait taillé dans la roche et qui, sur une portion, fait à peine un mètre de large avec un à-pic vertigineux… Je regarde mes pieds et me mets en mode œillères, surtout ne pas regarder derrière, vers le bas, le vide... 

    Je monte à bonne allure et arrive au balcon supérieur. 

    Récit Antoine IV

    Il faut désormais parcourir ces 350-400 m coincés entre la falaise et le vide... À la moindre erreur, ce n'est plus une roulade dans le pierrier, mais une chute vertigineuse et la mort assurée !                                                                                    (NB : Un concurrent du Grand Raid de la Réunion 2012 [170 km 10.000 m D+] est d’ailleurs décédé ces conditions et un autre au Tor des Géants [330 km 24.000 m D+], 2 jours après cet UTV, suite à un trauma crânien lors une chute dans une descente, mais pas dans un ravin)   

    Récit Antoine IV

     Je reste un court instant tétanisé.Demi-tour impossible, je me raisonne et laisse des concurrents plus assurés me doubler pour ne pas risquer d’être bousculé sur cette portion.« Pas de panique, il faut y aller d’une traite, me lancer... » Me dis-je !  Une bonne vingtaine de traileurs passe avant que je me calme et m’élance, m’étonnant même de retrouver une relative assurance, voire une certaine intrépidité.

     

                                                                          C’est un bon début de thérapie : guérir le mal par le mal !

    La sortie de la passe est bienvenue et j’ose espérer qu’il n’y ait plus de tels passages !

     Je suis rejoint par Ariel. On se salue, échangeons quelques mots et je le laisse filer, car j’ai prévu une halte restauration-vidange. 

     Derrière lui, mon regard est attiré par un concurrent le visage totalement en sang (dossard n°31). Je prends de ses nouvelles et lui propose mon aide, qu’il refuse tout comme celle du CRS Montagne qui vient à notre rencontre. Il me double au point d’eau de Combeauvieux, où il refuse aussi l’eau pour se laver le visage, puis je le redouble avant Corrençon. Je retrouverai ce (soixantenaire) courageux bien plus loin, bien plus tard… D’ailleurs, il est sur la seule photo de cette course où je figure. 

     La descente est, de mon point de vue, technique : elle est escarpée et le chemin est non stabilisé et très caillouteux. C’est en fait une piste de ski taillée dans une pente trop raide pour les engins de damage, mais il n’y a pas de végétation dessus et la pluie a fait son œuvre destructrice en la ravinant.                                                     Je n’aime pas du tout ce type de terrain, n’y suis nullement préparé et redoute l’entorse, voire pire. Je me tors plusieurs fois les chevilles, je ressens parfois un vif pincement sur celle de droite... Rien de grave, juste un souvenir d’un vol en escalade sportive !La première partie est difficile et à mi parcours de Corrençon, la pente faiblit et le chemin devient relativement carrossable.On arrive aux abords d’une station de sports d’hiver, où une famille attend bruyamment un papa et encourage aussi tous les coureurs... Une petite boutade pour les remercier...  

    Durant cette longue descente de près de 750 m de dénivelé et moins de 6 km, une vingtaine de concurrents me doublent encore. Parmi eux, des quart-relayeurs partis 2 h après nous... Déprimant ! 

    J’ai conscience que pris un retard considérable du fait de mes angoisses sur ce premier relais qui m’ont fait perdre de nombreuses places, me coinçant ainsi pendant 10 longs kilomètres derrière des concurrents ayant une allure inférieure à la mienne sur les portions roulantes, m’empêchant ainsi d’exprimer mes (modestes) qualités de course à piedS (je mets un ‘S’ car je cours avec mes 2 pieds).  

    Je ne sais pas encore que je suis parmi les tous derniers...                                      Et en perdant des places, j’ai aussi perdu un temps précieux compte-tenu des barrières horaires...  

    9h11 – Corrençon-en-Vercors : premier ravitaillement complet, fin du premier relais.  

    S’il y avait eu une première barrière horaire, aurai-je pu repartir ? J’ai parcouru 23 km et près de 1.200 m de D+ et 1.100 m de D- en 4h12’02’’. La honte !!!Je découvrirai bien plus tard que je suis 318ème sur 329… et que le premier à 1h45’22’’ d’avance ! Durant toute la course, ma montre GPS sera mon seul repère de temps – tant que la batterie fonctionnera – et je n’utiliserai que le chrono. Et loin de moi l’envie d’avoir le moindre renseignement sur mon classement ou ma vitesse moyenne, de peur d’être démotivé. A juste titre. Je découvrirai mes chronos intermédiaires, mon classement et les détails de ma course, seulement de retour chez moi, mais les intègre cependant dans le fil de ce récit.  

    Je remarque qu’il n’y a pas beaucoup de solos ou de team au ravito, mais ne réalise pas vraiment qu’ils sont tous loin devant et qu’au quart de la course, j’ai pris un retard quasiment irrattrapable.  

    Je range ma frontale, refais un bidon de boisson énergétique et recharge celui d’eau, avale une pâte de fruits et un paquet de mini-Tuc, bien moins bourratifs que les classiques.La fatigue de la descente est bien présente et je me pose la question de savoir si et comment je finirai cet ultra-trail. Si je le termine, j’ai des doutes… 

    Je repars au bout d’environ... 15mn ? Je ne sais plus, mais c’est trop long ! 

    Récit Antoine IV

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